Vous êtes nombreux suite à la lecture de Carla à me poser des questions sur le piratage. Je ne suis malheureusement que le pigeon qui s’est fait tristement dévoré et je n’ai pas de solutions à vous offrir. La vie m’a appris que nul n’est à l’abri de ce procédé honteux et lâche. Et comme me disait avec humour un homme de loi » pirater un jour, pirater toujours. »
Le piratage est un des fléaux de notre société induisant une violence que seule une personne visée peut comprendre. Pour les autres, c’est amusant voire un bon divertissement. On en a la preuve sur les réseaux sociaux, certaines personnes crient au piratage simplement pour éviter de montrer publiquement leurs incapacités ou leurs paresses. Pourtant, le vrai piratage a des conséquences qui sont cruelles. J’y ai perdu la confiance, la santé et surtout longtemps, je n’ai pas su vers qui me tourner. À côté de tous les horreurs de notre société, cela peut sembler bien anodin et surtout faire naitre une coupablilite car chacun reste conscient qu’il existe des signes précurseurs que l’on n’a compris qu’après par aveuglement ou par simple refus d’y croire.
En ce qui me concerne, mes premiers doutes sur un piratage possible sont apparus durant l’été 2010. Une intuition, celle de ne plus être seule sur mon PC. Mais comme chacun le sait, si les comptes bancaires ne sont pas touchés, on ne s’affole pas. Quand on n’a pas de cadavres cachés, on se moque un peu d’être visitée parce que l’on n’imagine pas le pire. J’ai même demandé à une relation de l’époque comment protéger mes fichiers par un mot de passe mais je n’ai jamais obtenu la solution. Je ne sais toujours pas six ans après si elle existe.
Une fois que la situation est enclenchée, elle va vite dégénérer. J’ai assisté impuissante à l’envoi de mails non moins étranges provenant de mes adresses mails. J’ai cru que j’avais failli en prenant des mots de passe trop simplement. Quand on n’y connaît rien en informatique et que l’on n’a rien à se reprocher, on se dit que tout rentrera dans l’ordre avec un bon antivirus. Au bout de trois différents, on commence à paniquer. Et puis un jour, le simple doute va se transformer en stupeur. Le PC se vide tout seul de tout ses fichiers, de tout ses mails stockés dans Outlook ( aussi bien mails pros que mails privés). On se retrouve du jour au lendemain dans un piratage digne d’un polar. Vous avez été nombreux à me dire d’en écrire une enquête d’Antoine Bourgnon mais la cicatrice saigne encore. Un jour, peut être … Une chose est sûre, j’y ai perdu mes premières nouvelles, sept chapitres de mon premier vrai manuscrit, et surtout j’ai vu apparaître des mois après des extraits dans de soit disant courriels envoyés. Ah quelqu’un s’est bien amusé !
Cette infiltration dans mon intimité fut insoutenable. Elle m’a changée, m’a enfermée dans une solitude forcée durant plusieurs mois, m’a rendUe moins ouverte aux autres.
J’ai subi trois ans de piratage par vagues, sans oser faire face, ( et que ce soient les dépôts de plaintes, les lettres recommandées rien ne fut efficace ! Je me suis juste sentie coupable d’exister jusqu’au jour où une porte s’est ouverte et où on m’a démontré que « le hacker » avait élu domicile sur mon adresse IP fixe. Enfin une explication rationnelle ! Je n’étais pas folle ( si, si, il y en a qui ont voulu me le faire croire !) . J’étais juste un pigeon ! Le voile s’est déchiré. Je comprenais enfin la raison pour laquelle des adresses dites sécurisées avaient servi de terrain de jeu. Nul n’échappe à une prise en main à distance.
Existe-t-il une option infaillible ? Bien sûr que non ! Le piratage est le fléau de notre société. J’ai découvert que ces individus passent par des proxys pour ne pas être repérés et sauf si vous êtes un terroristes ou un pédophile notoire, tout le monde se fiche éperdument des dommages collatéraux que génère ce type de violence. J’ai opté simplement pour le changement de FAI, de PC, de mode d’organisation. En clair, Je n’utilise qu’exceptionnellement mon PC préférant ma tablette paraît-il moins piratable. ( entre nous, je reste sceptique )
Le piratage est un viol. Il faut le vivre pour le comprendre et comme toute agression, on devient prudent, vigilant et surtout on ne fait plus confiance comme avant.
Avant, je laissais mon PC allumé tout comme mon wifi, j’entassais mes brouillons, mes idées, mes poèmes, mes mots sur ordi. Aujourd’hui, c’est bien fini.
Quelqu’un dont je ne connaîtrais jamais l’identité m’a dépossédée d’une partie de mes rêves, de mes idées, trafiquant mes pensées, se servant de mon réseau, de mes écrits pour me dénigrer, pour me tenir la tête sous l’eau, révélant mes peines ou mes faiblesses.
Être piratée change la façon de voir la vie. Bien sûr, on continue d’avoir une appréhension, une certaine peur, ce qui m’a collé l’étiquette « parano » mais qui peut aujourd’hui me certifier que personne ne se ballade dans ma vie ? Heureusement, j’ai appris à relativiser. La souffrance aide à avancer. J’ai été méprisée telle une sorcière de Salem sur des faits trafiqués. Le pirate a du bien jubiler ! Mais il n’a pas eu ma peau. Je suis toujours debout, plus fragile mais debout.
Mon seul regret avoir été jugée par des personnes à qui je tenais sur des actes que je n’avais effectuéS. J’assume toujours mes erreurs mais je refuse de porter celles des autres.
Je constate à vous lire que je ne suis pas un cas isolé et c’est le plus dramatique. Pirater quelqu’un, c’est prendre le pouvoir sur sa vie, sur ses émotions, sur ce qui est le plus intime. Se servir d’un piratage pour détruire une vie, pour essayer de la détruire est abjecte. La culpabilité prend souvent le devant. On se sent coupable de n’avoir pas parlé, d’avoir laissé dire, d’être rentrée dans un terrier bien profond et de n’en être sortie que trop tard.
Ceux qui piratent, je parle juste du piratage privé et non financier, se créent une vie par procuration au détriment de la vraie vie. Notre seule arme, se relever, toujours. C’est notre meilleure réponse mais il faut savoir qu’ils sont pires que de la glue, tenaces et surtout inventifs. Ils ne lâchent jamais sauf s’ils trouvent une autre proie.
La meilleure carte ? L’indifférence …