Hashimoto et moi
Ah, Hashimoto, maladie avec qui je suis « maquée » depuis trois ans maintenant, qui est plus jalouse que mon propre mari, me tenant dans ses tenailles, revenant lorsque je m’éloigne. Dernièrement, une personne que je connais bien s’avéra surprise que je sois « encore » Hashimoto. Eh bien oui, cette maladie, je ne pourrais en divorcer. Elle est mienne jusqu’à ma mort même s’il m’arrive de la détester. Tel un amant volage, elle me laisse parfois en paix durant quelques mois, à tel point que j’en oublie son existence si ce n’est mes gouttes à prendre tous les matins. Et puis soudain, sans crier garde, sans me demander mon avis, elle débarque avec violence, n’hésitant pas à me mettre un bon coup de poing en pleine figure.
Vous entendrez des bonnes âmes vous susurrer que ce n’est pas grave, que vous êtes une satané fainéante, qu’il faut bouger votre popotin et tout ira bien. Seulement la réalité est autre. Stabilisée, vous n’avez aucune raison de redouter un coup bas, pourtant il est bien là. Un matin, la fatigue vous terrasse, sans cogner à la porte, sans autorisation, vous avez envie de dormir, votre peau se dessèche, les yeux vous brulent, l’angoisse vous saisit, la libido se ramollit ou à l’inverse, vous êtes sur les nerfs, avec le coeur qui tambourine, votre tsh jouant au yoyo. Quand on vit avec, nul besoin d’une prise de sang en urgence, on sait que la crise est là, qu’elle va durer quelques jours et qu’ensuite, si elle ne passe pas, on avisera. Le commun des mortels ne verra rien, juste des cernes sous les yeux, juste quelques bâillements plus prononcés mis sur la fatigue classique, parfois un changement possible d’humeur, ou pas. Mais vous, vous savez, Hashimoto est bien là, vous faîtes tout pour l’oublier, sans succès. Personne, pas même vos proches, à la longue, ne le remarqueront pas. On s’habitue à tout et puis, nous, les malades de la thyroïde, si notre papillon a flanché, c’est bien parce que l’on n’est pas très doués pour les crier nos émotions, alors on va juste sourire, un peu tristement, sans rien dire, pour ne pas déranger.
Pourtant ne croyez pas que l’on n’a pas besoin de vous, de votre écoute, de votre soutien . C’est dur de voir brusquement un corps que l’on croyait sur pied ralentir de nouveau, compliqué ces mots que l’on oublie, ces objets que l’on ne retrouve. Hashimoto peut se révéler dans ces moments un véritable handicap.
Organisée, structurée, sous l’effet d’une crise, je peux soudain me retrouver l’esprit vide et embué, butant sur mes mots. Bien sûr cela ne dure pas, mais le temps de réajuster le traitement, de gérer mon stress, de faire fie de mes angoisses, cela peut prendre plusieurs jours, phénomènes critiques lorsque l’on travaille. Et ne me dîtes pas qu’il suffit de s’arrêter, de se mettre en arrêt de maladie. Ça, c’est bon pour » les vrais malades », car notre papillon est invisible surtout s’il s’autodétruit, et on ne vous met pas en pause pour si peu. La plupart des toubibs ne comprennent même.
Lors de ma dernière PDS, je suis tombée sur une laborantine adorable qui m’ juste dir » Courage, j’ai aussi un souci de thyroïde et c’est un enfer » On a presque l’impression de faire partie d’un club.
Je reste scandalisée que l’on arrête plus facilement un dépressif, que l’on compatisse sur un alcoolique plutôt que sur un malade Hashimoto en crise ! Lequel se farcit pourtant une cochonnerie de maladie auto-immune jusqu’à la fin de ses jours ?
Il y a un an, mon éditrice et moi-même avons sorti « Hashimoto, mon amour » pour secouer les mentalités. Un an après, des médecins ont rejoint notre cause, nous ont félicitées, remerciées. Mon objectif de départ est atteint et pourtant, je reste insatisfaite avec l’impression de ne pas avoir fair assez. Je voudrais que nous puissions aller plus loin, secouer le cocotier, faire tomber les barrières, offrir une vraie reconnaissance aux malades, à ceux qui en ont besoin, car nous avons vu que certains vivent bien leur maladie et c’est tans mieux.
Nous sommes tous différents, nos anticorps vont nous agresser différemment. Certains mettrons des années à tout bousiller, d’autres le feront en un claquement de doigts. Certains se contenteront de surveiller l’évolution, d’autres devront se gaver d’hormones de synthèse, d’ajuster, de tenter des médecines alternatives.
Peu importe pourquoi cette maladie est apparue, La vie est ainsi, il faut en prendre son partie, et nous, de notre côté, nous pouvons juste essayer de ne pas rester dans l’ombre et nous faire oublier. Prenons les armes, ensemble et en guerre contre nos anticorps !
Pour soutenir notre cause
Hashimoto, mon amour
En numérique
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En version papier directement à l’adresse suivante
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