L’horreur de la page blanche
Tout écrivain connait à un moment de sa vie ce syndrome horrible qui porte un nom très scientifique « la leucosélophobie », l’impossibilité de poser des mots sur le papier, le trou, la panne sèche. Je pense que ce phénomène touche beaucoup plus les grands auteurs que les petits gribouilleurs simplement parce que l’enjeu n’est pas le même, sauf si « un petit » se met tout seul la pression. Un Musso ou un Levy est attendu au tournant avec un chèque d’avoir conséquent, l’erreur est impossible sinon direction Pôle Emploi. Les gens comme moi, et bien d’autres amis auteurs, se contentent d’aimer écrire. L’inspiration n’est pas vraiment un problème, le temps pour mener à bien un projet l’est. Des idées, j’en ai des cahiers entiers, non mon principal souci n’est pas cette peur du vide que procure la page blanche, mais le non-désir de publier mes écrits.
Écrire fait partie de mon essence depuis toujours, être publié est une expérience récente datant de moins de trois ans, et je m’aperçois que je n’en tire pas grande satisfaction, surtout pour mes romans. Le cycle des Carla avait un but, un peu une lettre ouverte à qui voulait l’entendre, des mots qui sonnaient forts pour être entendus, des mots destinés à ouvrir une vérité, seulement le monde d’aujourd’hui n’a pas envie d’entendre ni de changer et quelque part, la personne qui fut l’encre n’a jamais lu ces livres, triste réalité. Au final, mes mots résonnent creux, parfois sont détournés de leur sens premier. La page blanche, je n’ai pas, le découragement, oui. Heureusement que mon inspecteur Bourgnon, lui, a toujours autant de succès ! Quant à la guerre constante entre les indés et les éditions classiques même si elles sont peu connues, tout ce milieu me fatigue et ne me donne plus envie.
Aujourd’hui, j’ai plusieurs projets en cours, un roman, un prochain polar ( eh oui, Indigo ne sera pas le dernier), un roman jeunesse ( qui me motive beaucoup) et plusieurs projets dont celui de réécrire totalement ROUGE, juste par pur défi. Ce fut mon plus gros succès et pourtant celui qui était le plus mal écrit. Donc pas de page blanche pour moi, mais une certaine amertume face au monde de l’édition, certainement. Mais après tout, ce n’est pas mon métier, ce qui m’autorise au final d’avoir mon mot à dire n’ayant rien à perdre et tout à gagner. L’important n’est-il pas surtout que je puisse continuer à danser sur les lignes ? Et puis est-ce si important d’être édité ? L’important n’est-il pas d’écrire ce que l’on a au fond du coeur ou de faire comme une auteure rencontrée recemment sur Linkedln, publier ses manuscrits simplement sans tapage juste pour laisser une trace ?
Ecrire, je pense, existe surtout parce que l’on a des choses à dire. C’estains en ont d’importantes, d’autres de très personnelles… Et certains de tremper leur stylet à la bave de leur animosité, leur inacceptation des êtres et du monde.
Tout cela fait la littérature. Le travail et le talent font la force de l’écrit, la lecture la reconnaissance.
Dance Sylvie, dance ! Tes entrechats sont de belles chorégraphies et l’encre laissée au papier par eux le témoignage de la plus belle des envies. Peu importe le sens qu’en tirent (ou en espèrent? ) les autres. Ton ballet est le sang de ton âme et c’est cela le plus important