Ces livres que l’on cache
Très amusée par une remarque de mon fils à son retour d’une visite scolaire où il a du se débrouiller seul en métro. Il a aimé le métro parisien même s’il s’est bien perdu, mais ce qui l’a surpris, c’est que beaucoup de personnes lisent, mais des livres dont les couvertures sont cachées.
Eh oui, ces romans dont on cache le titre parce que l’on a honte de les lire, ces romans qui pourraient nous définir. Pourquoi tant de personnes se cachent-elles ? Pire, pourquoi une telle honte ?
Je pense tout d’abord que longtemps le roman érotique fut juste synonyme d’outil masturbatoire, et donc mis dans la case « genre douteux ». Les personnes « dites biens » n’avaient pas besoin de telles histoires, pire ne devaient pas penser à des scènes pouvant leur donner des envies. Nombreuses personnes mélangent encore une jolie scène d’amour où les préliminaires faits de douceur, de caresses même intimes sont jugés pornographiques.
Pourtant, la littérature érotique n’a jamais été aussi plébiscitée, spécialement depuis la sortie de 50 nuances de Grey. Les grandes surfaces regorgent de romans passion de type Harlequin où l’intrigue niaise ne présente un semblant d’intérêt qu’au travers des scènes torrides qui émoustillent.
Soyons honnêtes pour une fois, hormis la jeune femme libérée qui butine avec délice, la ménagère n’a guère le temps de faire moult cabrioles dans des draps en soie. Et si certaines lectrices y puisent quelques fantasmes, où est le mal ?
Prenons le best-seller « 50 nuances de Grey » dont la pauvreté de l’écriture n’est plus à dire. Les femmes, puisque ce sont majoritairement des femmes qui l’ont lu, ne l’ont donc pas fait pour le simple plaisir de savourer de jolis mots, mais pour vibrer avec Christian Grey, tout en gardant une attitude choquée par rapport aux scènes de bondage. C’est le fantasme par procuration, anodin car sans danger pour le couple institutionnel.
Ne nous trouvons-nous pas face aux rêves secrets de toutes les femmes ? Un homme, mystérieux, passionnément amoureux, capable d’offrir le Nirvana, même si la manière d’y arriver n’est pas classique.
Dans une société où toutes les valeurs s’écroulent, reste l’amour, et quoiqu’on en dise, les jeux érotiques sont la cerise sur le gâteau. Alors, pourquoi vous cachez ?
Osez, soyez ce que vous voulez être. Une femme a le droit de revendiquer ses désirs, de dire non également, de lire ce qui lui plait sans être jugée.
Auteur de polars ou de romans de vie, j’avoue qu’un roman érotique m’ennuie vite. La pratique me laisse moins de marbre, rassurez-vous, mais cela ne m’empêche pas de revendiquer le droit à choisir ce type d’écrits, à ne pas avoir honte, simplement parce qu’un livre reste une histoire, et que toute histoire mérite d’être découverte.
J’ai découvert une très belle page d’un blog sur les livres érotiques qui autorise le lien. Bravo à cette personne ! Un travail d’analyse remarquable.
https://anneelisa.wordpress.com/2013/02/24/les-lecteurs-de-livres-erotiques/
Le cache livre est un outil… vieux comme le livre. Même quand lire restait un privilège, une marque d’éducation de « valeur », les lecteurs n’ont pas toujours apprécié que autrui connaisse ses lectures.
Il en allait de la Censure, à la honte, bien sûr, et à la diversion. Je me souviens des années collèges quand, interne, nos lectures étaient très surveillées et que les livres devait être « estampillés », visé par l’accord des pions qui nous surveillaient, quand ce n’était pas carrément le visa du surveillant général (ou censeur disait-on à une époque… Tiens-tiens ! ) lire le « non autorisé » était un challenge qu’on se refilait entre « liberphiles »
Les temps bougent, et point trop les usages