Vieillir
Inéluctablement, incontournable, nul n’y échappe. Vieillir est difficile, et pourtant, chacun devrait s’y préparer et le vivre avec philosophie. Si c’était si simple ! Allant avec la régularité d’un métronome voir ma mère dans sa maison médicalisée, je me retrouve telle une claque confrontée à la vieillesse « moche » comme j’ai coutume de dire, celle où la fin est indigne d’une vie bien remplie. Et puis, il y a les autres comme ma grand-mère qui faisait encore son marché à quatre-vingt-treize ans la veille de sa mort.
Vieillir, c’est prendre conscience que l’on a beaucoup plus de temps derrière nous que devant, c’est rester réaliste sur les choix à faire et ceux qui nous sont maintenant interdits. Freiner parfois par cette carcasse qui pèse, trop de personnes « meurent » avant l’heure, de l’intérieur. Est-ce un crime de s’autoriser à dire que l’on ne peut plus ? Est-ce une raison pour ne plus vivre ? Je dis non ! Chaque personne est unique et je connais des jeunes femmes avec un corps de mamie, et l’inverse. Mais ce que l’on est, on le reste !
Personnellement, je prends de l’âge et je n’ai pas peur de mourir, un peu plus de la vieillesse n’ayant aucune envie de finir en légume comme ma mère. Aussi consciente de cette épée de Damoclès, de ce couperet au dessus de ma tête qui peut trancher net ma mémoire, je revendique mon droit à la vie. J’ai compris qu’il ne faut pas s’encombrer de regrets, qu’il faut tout tenter pour partir un jour en ayant vécu heureux, en ayant rendu les autres heureux. Vieillir, c’est préparer « l’après nous », laisser des lettres, des traces de ce qui fut, ne jamais conserver des morceaux de rancune ou de haine. Les autres n’ont pas à porter nos fardeaux.
Vieillir c’est surtout s’accepter, s’aimer. Quand je lis des commentaires de femmes de quarante ans dépressives, pleurant sur quelques kilos en trop, sur quelques rides, je leur fais un pied de nez en leur disant que je m’aime beaucoup plus aujourd’hui que lorsque j’avais vingt ans. Je me moque de mes cheveux qui blanchissent, il y a des colorations pour leur rendre leur beauté, je me fiche des rides, elles montrent que j’ai autant souffert que ri, de mes kilos qui au final me donnent bonne mine ! Je n’ai jamais été centrée sur mon image et je ne m’attarde pas devant un miroir. Dans dix ans ? J’espère avoir toujours le sourire, même si je sais que mon dos me fera certainement beaucoup plus souffrir. Et surtout, je ne m’attarde plus sur l’avis des autres. On m’aime, c’est tans mieux, on ne m’aime pas, et bien qu’est-ce qu’ils perdent à ne pas me connaître vraiment !
Vieillir ? Et alors ? L’horloge du temps commence à peser ? Certainement, mais cela ne m’empêche nullement de rêver, de m’autoriser à me lancer des défis, à me battre pour les réaliser, à avancer sans regarder en arrière.
On dit que Noé et bien d’autres auraient vécu neuf cents ans, c’est un peu long …
Vieillir, c’est vivre tout simplement en paix, avec sagesse, en se disant juste que contrairement aux malades d’un cancer, nous, il nous en reste encore un peu, de ce temps ….
Vieillir c’est vivre