#Pasdevagues
Depuis quelques jours, les langues se délient, on ose enfin parler ! Eh oui ! Pas de vagues ! C’est le slogan de l’éducation nationale. Un bon enseignant se doit de faire profil bas, parce qu’il a les épaules larges, parce que c’est un vrai professionnel !
Il faut que se déchire la toile de l’illusion ! Les enfants d’aujourd’hui ne sont pas des anges. Est-ce la faute aux médias qui ne cessent de montrer de la violence, à l’éducation donnée par les familles, aux objets connectés ? Est-ce important la cause ? Seuls les faits me semblent primordiaux. Un enfant de huit ans n’hésite plus à insulter un enseignant en le regardant droit dans les yeux. Le petit chou ne veut pas travailler, et l’insulte fuse. La petite chérie a perdu son manteau et la mère indignée vient donner une baffe à l’enseignante, une rematque lors d’une leçon non apprise, et un doigt d’honneur est la répinse ! Certes, les classes surchargées n’arrangent rien, mais ai-je envie d’ajouter, « à mon époque » nous étions trente-cinq dans la classe où j’enseigne aujourd’hui, et nul n’aurait eu l’idée de répindre ou de lever les yeux au ciel. On a mis les enfants rois sur un piédestal et on le paie très cher aujourd’hui !
Et je ne parle même pas de ces adultes se pensant au dessus du dialogue qui vont directement demander le renvoi d’un enseignant au rectorat simplement parce qu’il sont eu avec un problème personnel sans rapport avec l’école. #Pasdevagues. À tous ceux qui vont chipoter le moundre détail, allant jusqu’à casser sur le devant de l’école « de l’enseignant ». Et toujours le #Pasdevagues, réponse de l’institution. Bien sûr, on vous fait savoir que ces enfants ont de gros problèmes ( non ? On était tellement stupides qu’on ne l’avait pas compris), que ce père hystérique n’est pas bien dans sa peau ( là encore, on nous prend pour des buses !) , que cette mère qui ne cesse d’agresser cet enseignant n’est qu’une personne ayant mal vécu sa propre scolarité ( ouais, et alors ? Enseignant égale punching-ball ! ). L’institution regarde avec mépris ceux qui se plaignent, ceux qui osent dire que cela va mal, ceux qui s’opposent. #Pasdevagues
Pendant plus de vingt -cinq ans de carrière, j’ai côtoyé des élèves et des parents fabuleux, mais je me suis aussi trouvée confrontée au « #Pasdevagues ». parce que que nous sommes soumis au devoir de réserve, ce qui veut dire que l’on se doit fermer sa bouche, courber le dos, continuer de sourire face à l’hypocrisie de certains et au final, de prendre les coups sans moufter ! Et ça marche ! Je l’ai vécue. J’ai fermé ma bouche comme on me l’avait demandé. J‘ai subi la violence gratuite de parents qui avaient un sérieux problèmes, d’histoires mensongères comme celle de la télé ( j’en parle souvent, car elle reste bien councée cette téké qui n’existait pas), j’ai développé une maladie auto-immune irréversible et de sérieux soucis de santé à tout garder. Des années après, mon corps continue sa lente destruction vers une fin inéluctable qui n’arriverait certainement pas si vite si j’avais osé faire des vagues ! Si j’avais eu le courage de braver l’institution, de dire non au #Pasdevagues
On a tous -, un jour, connu, nous les enseignants, une situation compliquée face à un élève. On a tous un jour connu une situation compliquée face à un parent. On a tous souffert en silence en serrant les dents parce que nos collègues étaient tout aussi impuissants que nous, parce que la direction voulait ménager la chèvre et le chou en évitant de trop s’éclabousser ( ben oui, c’est toujours inconfortable les conflits ! Et puis un parent, surtout s’il est friqué, pas touche !) alors on nous chuchote doucement, #Pasdevagues, rentre chez toi, calme-toi, seulement l’injustice reste. Non, un enfant n’a pas le droit d’insulter ou d’agresser. Non, un parent n’a pas le droit non plus de détruire un enseignant pour son propre plaisir. C’est une fois rentrée chez nous que les vannes s’ouvrent, on pleure, on se sent même coupable de ne pas avoir réussi à garder le petit chéri dans le droit chemin, coupable aussi d’avoir laissé ces parents médire sur notre compte. Coupable d’être simplement un être humain. Parce qu’au fond, vous le découvrez peut-être, mais un enseignant n’est pas une machine. C’est un être humain, et les agressions permanentes autant venant des élèves que des familles usent vite. Alors #Pas de vagues ? Il serait temps que les vérités explosent !
En tous les cas, c’est pour cela que j’ai demandé ma retraite anticipée pour la rentrée prochaine , parce que ce #Pasdevagues m’a démolie, et que j’ai envie de vivre sans violence ! Dommage, car quel merveilleux métier je fais et comme je l’aime encore !
Merci à Anna chronique, talentueuse dessinatrice pour m’avoir autorisée à partager ce dessin au combien révélateur de #Pasdevagues
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