J’écris pour toi
Toi que je ne connais pas, toi à qui je destine mes mots afin de te faire rire, sourire ou pleurer. Toi qui n’existes peut-être même pas, mais que je modèle telle une sculpture pour ensuite doucement te cacher derrière les pages froissées de mes romans. J’écris pour toi qui ne lis plus, parce qu’aujourd’hui les livres ne servent souvent qu’à décorer, à être mis dans une bibliothèque pour faire semblant.
J’écris pour vous, qui n’êtes que vous, un mythe, une légende, un nom peut-être, mon inspiration.
Peu importe au fond pour qui j’écris, je ne le sais même pas moi-même, ce n’est pas très important au fond, seuls mes mots le sont, le plaisir que je prends à leur donner vie, l’évasion de quitter la réalité pour me fondre dans cet univers complètement déjanté, le fantasque, le rêve, l’imaginaire. Je noircis des mots pour laisser une infime trace dans le sillon de la nuit .
Je n’écris pas pour que tu m’applaudisses, pour que tu inventes une analyse de mes romans qui n’existe pas, pour m’offrir un prix auquel je ne crois pas. Ce monde-là n’est pas pour moi. J’y ai cru un moment, tu connais ma naïveté à toujours croire que l’autre ne ment pas, aujourd’hui, c’est fini. J’ai perdu mes illusions, pas ma passion.
Des pages de manuscrits s’entassent dans l’ombre, peu importe qui les lira, qui les publiera, elles seront toujours écrites pour toi, et rien que toi, toi qui jamais ne le sauras, toi à qui je ne le dirais pas, toi qui n’es pas, car mieux vaut croire en des rêves de gosses que de construire des châteaux sable qui s’effondrent. Mes mots sont coulés dans du ciment, et rien ne pourra les effacer. Parce que j’écris pour toi, mon lecteur inconnu, j’écris comme le font les enfants avec cet espoir au fond du coeur, que tu me lises juste, que tu fasses corps avec mes lignes, j’écris pour déterrer dans les sables mouvants les derniers espoirs de mes rêves d’enfant.